Pour les Arts de l’ISLAM au Louvre

chap. 1/3 :   -Premiers aspects

Comment ne pas se soumettre aux éléments caricaturaux dans l’ère du temps ? Les mots : ‘Islam’ ; ‘Mahomet’ ; ‘Musulmans’ ; ‘Mahométans’ ; ‘Manifestations’ ; ‘Vagues d’indignation’ ; ‘Salafistes’ ; ‘Intégrismes et Violences’ s’inscrivent… Dès lors, pourquoi ne pas aller voir de près l’ISLAM ? Se rendre compte de ce que la pensée, l’usage du pouvoir ou de la foi ont pu produire, non de stupide, d’opportuniste, de polémique (de satirique ou de sommaire en 2012), mais bien de ‘rayonnant’, d’apaisant, de culturel en un grand dessein… Allons donc au musée ! Dans un lieu qui a pour lui la distance des siècles pour nous donner à Voir, mais aussi le devoir de s’inscrire dans l’actualité – question, paraît-il, de rayonnement du Grand Louvre !?

En réalité, après l’ouverture de la fameuse pyramide, au sein du département des Antiquités orientales ce fut aussi un « il était une fois », un autre conte, ou une répétition générale : moment d’établissement médiatique pour une belle histoire des Arts islamiques...

Or cette section avait été conçue par un conservateur de renom, Marthe Bernus-Taylor. Et les visiteurs y pénétraient par l’entrée RICHELIEU ; donc du côté des Objets d’art, et non loin de l’Orient mésopotamien...

Ainsi le public pouvait bien percevoir, cadencé au rythme naturel de vitrines conçues pour quelque intimité, ou en des espaces par moments plus ouverts pour les tapis et mosaïques orientaux, un climat décoratif fascinant malgré les contraintes toujours apparentes d’un lieu fermé... On pouvait donc se délecter et décoder l’Art islamique en ce parcours d’objets essentiellement raffinés et géométriques – ici sélectionnés pour leur excellence – goûter aux fines métamorphoses de cette Art du signe et de l’écriture. Ainsi s’écrivait la belle histoire de l’Art des antiquités d’orient présentée pas à pas dans sa diversité et selon des arrêts successifs laissés à la libre attention de l’intelligence ! Il était d’usage que ce soit à partir d’un éveil sensible, que le reste, c’est-à-dire globalement « l’érudition », pouvait se découvrir en complément sur le terrain et dans les livres.

Seulement voilà, répondant à une identité fortement militante, nos autorités, politiques, diplomatiques et culturelles, en ont décidé autrement. Un grand projet fut ouvert...

La gageure, décision de Jacques Chirac (décret du 1 août 2003), était de faire pour l’ISLAM mieux que partout ailleurs. Les Dépôts d’art de l’Institut du monde arabe (IMA), le Département des Antiquités orientales (entrée RICHELIEU), le fond inouï des Arts décoratifs de Paris (rue de Rivoli) ont été réunis pour créer « l’une des plus belles collections au monde » selon Henri Loyrette, directeur du musée du Louvre.

Embarquement Louvre, entrée DENON. Décollons, montons cour Visconti... Et, dans les flux en direction de deux des trois vedettes du musée (Joconde et Victoire) allons, car il nous faut mieux goûter la vaste « mise en majesté des Arts de l’Islam » !

L’entrée DENON, état le 22 sept. 012 , pas un grand espace libre sans affichage !

D’emblée c’est le pire des abords. – Stop ! Pas trop de public encore, mais tant et tant d’occultations absurdes… Voici le dit Musée à présent encombré par son imagerie propre ; plus aucun espace visuel de ‘calme’ dans ce Hall d’accueil. C’est à suffoquer !

Plus de respirations et de vides verticaux ; plus d’éléments de silence pourtant judicieusement conçus (à ma connaissance, par Ieoh Ming Peï )! Et, cerise sur le gâteau, cet été, une stridence de plus fut offerte au personnel de ce hall du Louvre : des gilets fluo d’autoroute ‘citron-mélisse’ (pour indiquer où sont les gardiens du temple !). Des panneaux directionnels et des renseignements « utiles » partout, certes, mais… « trop d’effets tuent l’Effet », n’est ce pas !?

Sommes-nous devenus suspects dès l’entrée du musée du Louvre, ‘bêtes et aveugles’ à mater ? Des panneaux il y en a même tant que nous sommes très désorientés ! – Mais je rêve : « D’où Venons Nous - Que Sommes Nous - Où Allons Nous » ?

Au prétexte de bien nous diriger, au fond, c’est humainement révoltant !

Autour de l’Evénement « LES ARTS de l’ISLAM rayonnement au Louvre » considérons l’information chiffrée qui circule dans la presse.

On rapporte que pour l’installation nouvelle du Département islamique : 100 millions d’euros ont été mobilisés. 31 viennent de l’Etat ; et plus de 11 millions des ‘fonds propres’ du musée du Louvre... Mais que, façon libéralisme économique d’aujourd’hui, toutes les astuces de mécénats divers ont pu réunir 70 millions d’euros.

Dans le sillage de la Fondation saoudienne Alwaleed Bin Talal, ces fonds proviennent essentiellement d’industries et pays liés à la manne pétrolière… On retrouvera aussi dans la liste des heureux mécènes : le Maroc, le Koweït, le Sultanat d’Oman, ou encore, la république d’Azerbaïdjan pour un montant total de 26 M€. Enfin, des donateurs privés – individuels et entreprises – ont participé pour 30 M€. Parmi eux des groupes français, Total : 6 M€ ; Bouygues Construction : 1 M€ ; ou Lafarge : 4.5 M€.

Voilà donc ‘beaucoup’ d’argent incarné ici qui mérite, a-t-on pensé, quelques belles plaques de bronze pour son huitième département… Mais, grands dieux et muses des Arts, pourquoi nommer les mécènes dans le lieu d’exposition – dans le lieu même de la délectation – dès après l’entrée du département ? Fâcheux, non !?

Est-ce qu’à table, dans quelques restaurants fameux, on vient vous bailler encore la Carte au moment de l’assiette qui fume ?

Détail central de l’une des deux plaques présentes ici dans la salle

Des plaques de bronze ‘conséquentes’, sans toutes les données ‘fiduciaires’ certes, (informations chiffrées laissées ou suggérées ailleurs !), mais fortes de la liste complète de tous les heureux donateurs… Et surtout, nuance ! Plaques présentées à l’égal des objets d’art… –peut-être un ‘chef d’œuvre’ au sponsoring ? « Les musées sont-ils à vendre ? » titre Beaux-Arts magazine (octobre 2012).

Or depuis la Révolution française et le Muséum central des Arts – devenu bien public en 1793 (l’idée date même d’avant) – Le Louvre a su ménager, sans réclame déplacée (jusqu’il y a peu), la formule « d’honneur collectif » aux Mécènes du musée ; donc quelques endroits centraux, mais vestibules à l’écart des collections, par exemple, avant la galerie d’Apollon, ou présentement, affichée entrée RICHELIEU. Formule finement appropriée pour instituer le fils continu de la générosité au Bien public comme une philosophie exemplaire dans la société !

Avec ce précédent y aurait-il glissement et rupture symbolique avec l’authentique grandeur des précédents donateurs ? – Suite assez miraculeuse de la grande noblesse utopique et généreuse des Mécènes/Donateurs du Louvre ?

Lorsqu’un Amateur, ou une collectivité éclairée, achète par amour, par goût de la beauté, des œuvres d’Art pour faire vivre la pensée humaine, ses élans sublimes et sa création vivante… et va jusqu’à donner quelque autre sens aux instincts de la cupidité, voilà un DONATEUR PRINCIPAL !

On m’objectera :

-que nombre des donateurs obtiennent souvent quelque compensation, demandée par leurs amis, pour leur philanthropie ;

-que l’on consigne leurs noms (en petit) directement sur les cartels des œuvres d’art données, ou que telle ou telle partie du musée s’appelle collection X (en grand) ;

-et que le devoir de ‘transparence contemporaine’ ayant court, les établissements (EPIC) « émancipés » ont quelques contraintes nouvelles qui s’accommodent fort mal de la discrétion d’autrefois – et d’estimations essentiellement qualitatives (spécifiques aux choses de l’art...).

Or ne faut-il pas espérer encore que les jeux économiquement diplomatiques soient, effectivement, une affirmation de Mécénat, et non un jeu… du type Go ?

« Le privé mène-t-il une O.P.A. sur les Musées » (français) ; « leurs Noms et Domaines » ? (sic).

Un Amateur d’art, collectionneur et donateur de haute tradition, me faisait l’honneur de m’accompagner dans cette première visite.

Déjà froissé par l’état des lieux, il regarde la dite plaque : – «Hélas, je m’en doutais ; quelle nouvelle école du tact que ce Louvre ! Je ne sais pas si ‘d’être un amateur antédiluvien’ est encore un privilège à vivre à l’époque du sponsoring ! Mon cher artiste……!! ». Et ce Monsieur de baisser les bras et de me planter là...

à suivre  chap. 2 -second aspect : Les architectures